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Carnets berbères et nord-africains
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1 mai 2008

Chants soufis de Nadia At Mansur

La deuxième artiste dont nous recommandons absolument l’album est Nadia At Mansur, tant cette jeune chanteuse remet à l’ordre du jour un style de chant indissociable de la vie spirituelle des kabyles qui est connu sous le vocable Adekkar ou ddkar.

(JPG)

Ce style décrit précédemment, est rattaché à une pratique religieuse qui a pris racine au Maghreb en général et en kabylie en particulier : Le soufisme.

Le soufisme (4) est la voie mystique de l’islam. Les soufis privilégient l’expérience personnelle par rapport à la démarche communautaire. Le Dieu que découvrent les soufis est un Dieu d’amour auquel on accède par amour.

"Qui connaît Dieu, l’aime ; qui connaît le monde y renonce"

Ay ul leh’bab xelli ten (5)

Tsxilek ur ten id tsfekkir’

Ternud’ atmaten edj iten

Wid i k ixedmen lxir’

Iusa d lh’ub ghur’ R’ebbi

Wi iddan d Lleh d win axir’

Ô coeur abandonne les amis

De grâce n’ y pense plus

Quitte également les frères

Ceux qui t’ont fait du bien

L’amour divin est arrivé

Le chemin de Dieu est le meilleur

L’islam a connu son expérience mystique dès le VIIIè siècle. Certains musulmans, voulant vivre la rencontre intérieure entre le croyant et son Dieu, vont se retirer au confins du désert, notamment en Syrie et en Égypte.

Les docteurs de la loi s’en méfient et s’en inquiètent. Ils y verront une déviation de l’islam, en tout cas celui de Mouhammad qui privilégie la communauté à l’individu alors que ces "soufis" (du nom de l’étoffe de laine -Souf en arabe- blanche dont ils se recouvrent) veulent atteindre le salut individuellement. On les appelait fakir ou derwiche qui désignent les pauvres en raison de l’état de dépouillement auquel ils s’astreignent.

Dans leur quête de Dieu, les soufis préconisent le détachement à l’égard des choses de la vie, le jeûne, le silence, la méditation (twehid Uxallaq), etc. autant d’éléments qui vont à l’encontre de la vie communautaire. Mais ce qui inquiète encore plus les docteurs de la loi, c’est la réunion des mystiques sous l’autorité d’un cheikh (Chikh ou Ccix en kabyle), un maître qui développe une liturgie qui lui est propre et des techniques de méditations particulières, ce qui met en péril leur autorité religieuse et leur compétence de théologiens. Leur méfiance est grande vis-à-vis de cette voie qu’il faut suivre pour atteindre l’union intime totale avec Dieu qui procure l’extase.

Ay idjj’an cbigh miâr’uf (5)

D uruz ay deg iteffer

Sebghegh talaba am zaâluk

S’ebh’egh am nuâ d amsafer

Rr’ay fkigh i R’ebbi

Akken i S ihwa isker

Oui, je ressemble à la chouette

Qui se cache au creux d’un arbre

J’ai teint ma robe comme un pèlerin

Je suis comme un vagabond

A Dieu je laisse toute décision

Je me soumets à tous Ses voeux

Cette approche se fait sous l’autorité d’un maître dont le rôle est fondamental dans l’initiation. Autour du maître, le Chikh, s’articule la hiérarchie des lieutenants, des disciples, des aspirants qui obéissent à une discipline stricte. Ainsi naît la confrérie (connue sous le nom de Zaouia en kabylie). Chaque confrérie a ses méthodes d’initiation, des points de repères mis en place par le maître. Cela peut être la prière, la méditation, la musique et la danse, le voyage...Le dhikr par exemple est une prière collective autour du maître qui consiste à réciter des louanges à Dieu.

INFLUENCE DU SOUFISME EN KABYLIE

Le soufisme par sa tolérance a très bien pris racine en kabylie. A ce titre, une grande confrérie, la Rahmaniyya (Tarahmanit en kabyle), organisée au XVIIIè siècle par un cheikh kabyle a suscité l’insurrection kabyle d’El Mokrani en 1870. Elle a par ailleurs engendré un grand personnage considéré comme un Saint, en la personne de chikh (Ccix) Muhand. Notre village lui a rendu hommage à travers un chant de procession dans le style adekker (6) :

Le Chikh Mohand Ouel Hocine

Dont la piété embaume comme un grain d’ambre noir,

Disparut en allant à la source prier.

Ses fidèles se sont dit :

« Le lion l’a mangé » :

Mais lui, dans le secret, cheminait vers la Mecque ;

Ceux qui l’ont rencontré sont venus témoigner.

Je le jure par la Grâce de Dieu,

- A moins que la mort ne m’ait pris -

(Il n’est pas d’autre Dieu qu’Allah.)

Je marcherai parmi les sables,

J’entrerai dans la mer aux poissons.

(Il n’est pas d’autre Dieu qu’Allah.)

Au pèlerinage de l’Hachimi,

J’apparaîtrai sur le seuil du prophète !

(Il n’est pas d’autre Dieu qu’Allah.)

Afin de pouvoir apprécier cette voix magnifique, nous vous invitons à écouter ces extraits des chansons composant l’album.

Ur Lli? Je ne suis pas Extrait

MP3 - 175.9 ko

1

A k Cekkre? Louanges à Toi Extrait

MP3 - 215.2 ko

2

Ul inu d ameksa Mon coeur est un berger Extrait

MP3 - 175.9 ko

3

Urji? L’attente Extrait

MP3 - 175.9 ko

4

Rebbi fella? d aessas Le seigneur est notre gardien Extrait

MP3 - 175.9 ko

5

Ddunit a tarju Le monde peut bien attendre Extrait

MP3 - 175.9 ko

6

Tizerzert tawehcit La gazelle sauvage Extrait

MP3 - 175.9 ko

7

Subbe? Je suis descendue Extrait

MP3 - 175.9 ko

8

Ala ad? a? Rien qu’une pierre Extrait

MP3 - 174.9 ko

9

Nous vous invitons à donner votre avis sur le soufisme sur le forum dédié à ce sujet.

Références bibliographiques :

(4) Cyril Glassé, Dictionnaire encyclopédique de l’islam (Bordas, 1991)

(5) Remdan At Mensur, Isefra n at Zik, Poèmes kabyles d’antan, Editions Ibis 1998

(6) Taos Amrouche, Le Grain magique, contes, poèmes et proverbes berbères de kabylie, Maspero 1966 Jean Amrouche, Chants berbères de Kabylie, Maxuala-Radès Tunis, Monomotapa, 1939

Les oeuvres présentées ici peuvent être obtenue auprès de ocoram@wanadoo.fr

Source: tizi hibel.free

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